Témoignages de Iman, survivante de MGF et Cheick Abdourahman, engagé contre les VBG
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Non aux violences basées sur le genre (VBG) et aux mutilations génitales féminines (MGF) !
"Mon histoire est façonnée par la gentillesse de mon mari, de mon père et de mon oncle. Les hommes, qui sont souvent éloignés des 'histoires de femmes', doivent comprendre que les mutilations génitales féminines ne sont pas seulement un fardeau pour les femmes. La violence n’est jamais seulement un problème de femmes."
Imane, 25 ans, survivante des mutilations génitales féminines (MGF).
Imane, courageuse et forgée par son histoire, a surmonté les séquelles de l'excision qu'elle a subie durant sa jeunesse : "J'ai appris à distinguer les aspects positifs de notre culture et les zones sombres qui doivent être mises en lumière. Bien que cela soit difficile, je crois que le changement est encore possible, car les gens sont sincères à ce sujet. La mort de ma mère lorsque j'avais 12 ans a bouleversé ma vie. Et mon père a dû faire face à des problèmes que beaucoup de pères n'ont pas à affronter."
Le père d'Imane, Charmarké, travaille avec sa fille pour mettre fin aux MGF. Il partage son histoire avec sa famille et avec l'Association Caravanes et Savoirs du Désert, qui collabore avec le FNUAP pour créer une coalition d'hommes engagés.
"Ma première menstruation, survenue trois mois après la mort de ma mère, a été le déclencheur pour moi. Je n'avais d'autre choix que de parler de cela à mon père. Cela a été très difficile... Mon père ne voulait pas entendre parler de ma souffrance, je pense qu'il se sentait impuissant, et le tabou rendait difficile de parler de ces questions d'intimité féminine, surtout entre un père et sa fille. Mais petit à petit, à travers les discussions, les MGF, la cause de mon tourment, sont devenues la pierre angulaire qui a brisé la glace entre nous. Mon père m'a soutenue, m'a écoutée et a appris à m'accompagner."
Imane a défié les tabous en parlant ouvertement de sa souffrance à son père, et une véritable réconciliation a eu lieu. Son père ne pratique plus l'excision sur aucune de ses filles. Elle a été un phare pour son père, le guidant vers la prise de conscience des conséquences néfastes des MGF, sauvant ainsi ses sœurs au passage : "Aujourd'hui, j'aimerais créer plus d'hommes comme mon père, je pense que beaucoup sont comme lui et ne trouvent pas le courage de nous aider. Trop peu d'hommes parlent de ce problème, alors ma mission est de leur donner le courage dont ils ont besoin. Pour sauver les filles, nous devons atteindre leurs pères."
Imane, qui a commencé comme agente du changement au sein de sa propre famille, rêve de grandes réalisations. Elle souhaite avoir un impact sur nous tous, en particulier sur les leaders qui influencent le destin de notre société. Elle insiste sur la nécessité pour les hommes - pères, maris, frères - de prendre leurs responsabilités pour rééquilibrer les relations entre les sexes. "La violence envers les femmes est le résultat de relations inégales, et pour ajuster cet équilibre, nous devons rendre les hommes responsables."
Son cri d'alarme résonne dans un monde en changement. Elle appelle les jeunes à agir, à briser les tabous et à encourager le dialogue au sein des foyers et des communautés. Imane a créé son association, luttant directement contre les MGF avec les parents, partageant son histoire avec des jeunes qui aspirent à faire entendre leur voix.
"Aujourd'hui, je veux illustrer l'importance de l'engagement des jeunes pour transformer la société. C'est à nous d'agir, d'abord à la maison avec nos parents, puis avec nos oncles et amis. Si nous voulons le changement, nous devons briser ces tabous intergénérationnels, nous devons encourager le dialogue. Nous devons parler ; nous n'avons pas le choix. Il est temps d'agir."
Rejoindre le réseau Elle&Elles, créé par le FNUAP, a ouvert un nouveau chemin pour moi. Travaillant sur le terrain, mon association a été formée, et nous sommes tous devenus des éducateurs pairs. Aujourd'hui, je partage mon histoire avec de jeunes filles qui cherchent quelqu'un à écouter, comme moi. Mon histoire, jadis enveloppée de silence, est devenue mon symbole d'espoir et de résilience, soutenue par la force de l'écoute et de l'amour de mon père.
Cheikh Abdourahman Mohamed Ali, Président du Conseil Islamique Supérieur
Cheikh Abdourahman fait partie des leaders religieux en faveur de l’abandon des Mutilations Génitales Féminines (MGF). Il a rejoint le programme de lutte contre les MGF en tant que personne-ressource depuis 2008, au début du programme conjoint FNUAP-UNICEF pour l'élimination des MGF à Djibouti et est membre de la coalition nationale des leaders religieux pour l'abandon des MGF à Djibouti.
Il a formé plus de 450 leaders religieux, contribuant également à la création du réseau national des leaders religieux, le "Shamekat Djibouti", initialement créé en 2015, par le lancement du réseau régional des Organisations de la Foi des États de la région arabe à forte prévalence de MGF. Le réseau Shamekat de Djibouti est composé de 60 leaders religieux, dont 20 femmes appelées “mourchidates”.
L’engagement personnel du Cheikh se reflète dans sa vie familiale en tant que père de trois filles ; il a délibérément choisi de garantir la protection de leur intégrité physique face à ses proches. Il n’hésite pas à se servir de son propre exemple pour encourager les hommes, en tant que pères, à protéger leurs filles et à encourager les femmes à se débarrasser de cette pratique nuisible.
Le Cheikh Abdourahman est convaincu que le dialogue interreligieux doit être renforcé par le partage des connaissances afin de construire un message cohérent et puissant qui mette en évidence l'incompatibilité des MGF avec les valeurs fondamentales de l'Islam.
“Ma responsabilité en tant que père et leader religieux exige que je veille à la protection de mes filles avant tout. Il est souvent dit que la pratique des MGF est un problème de femmes, et je réfute toujours cela. Cette pratique n’a rien à voir avec la religion, et les familles doivent assurer la protection de leurs filles, car les filles représentent l’avenir de leur communauté.”