L'ONU propose un plan d'action pour lutter contre la crise climatique, la perte de biodiversité et la pollution
Sans l'aide de la nature, « nous ne pourrons ni prospérer, ni même survivre », a prévenu le Secrétaire général de l'ONU.
« Depuis trop longtemps, nous menons une guerre insensée et suicidaire contre la nature. Il en résulte trois crises environnementales interdépendantes », a déclaré António Guterres, lors d'un point de presse virtuel sur le rapport du Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE) intitulé « Faire la paix avec la nature ».
M. Guterres a souligné que le dérèglement du climat, la perte de biodiversité et la pollution « menacent notre viabilité en tant qu'espèce » en raison d’une « production et d'une consommation non durables ». « Le bien-être de l'homme réside dans la protection de la santé de la planète », a-t-il affirmé.
Relier les défis
Selon le rapport du PNUE, le monde pourrait s'attaquer en même temps aux crises du climat, de la biodiversité et de la pollution. Ces crises exigent toutefois « une action urgente de la part de l'ensemble de la société », a fait valoir le chef de l'ONU.
« Les choix des gens comptent », a maintenu M. Guterres, soulignant qu'environ deux tiers des émissions mondiales de CO2 sont liées aux ménages.
« L'atmosphère et les océans sont devenus des décharges pour nos déchets et les gouvernements continuent de payer plus cher pour exploiter la nature que pour la protéger », a-t-il regretté, ajoutant que « nous surexploitons et dégradons l'environnement sur terre comme en mer ».
Trio d'urgences
Le rapport montre également que l'économie mondiale a presque quintuplé au cours des cinq dernières décennies, mais à un coût énorme pour l'environnement.
Malgré une diminution des émissions de gaz à effet de serre en raison de la pandémie de Covid-19, le réchauffement climatique est en passe d'augmenter de 3 degrés Celsius au cours de ce siècle, alors que les maladies liées à la pollution tuent quelque neuf millions de personnes prématurément chaque année et que plus d'un million d'espèces végétales et animales risquent de disparaître.
M. Guterres a par ailleurs souligné que les femmes représentent 80% des personnes déplacées par le dérèglement climatique ; que l'eau polluée tue 1,8 million de personnes supplémentaires, la plupart étant des enfants ; que 1,3 milliard de personnes restent pauvres et que quelque 700 millions de gens souffrent de la faim.
« La seule réponse est un développement durable qui améliore le bien-être des personnes et de la planète », a-t-il développé, attirant l'attention sur les actions possibles pour les gouvernements, dont la mise en place d'un prix sur le carbone, le transfert des subventions des combustibles fossiles vers des solutions respectueuses de la nature et l'acceptation de « ne pas soutenir le type d'agriculture qui détruit ou pollue la nature ».
Le résultat final
Le rapport note qu'un changement de grande envergure implique une refonte de la manière dont nous investissons dans la nature et présente des arguments solides pour intégrer la valeur de la nature dans les politiques, les décisions et les systèmes économiques qui, entre autres, favorisent les technologies durables innovantes.
« L'essentiel est que nous devons transformer notre façon de voir et de valoriser la nature », a déclaré le Secrétaire général faisant valoir que les « bénéfices seront immenses ».
« Avec une nouvelle conscience, nous pourrons orienter les investissements vers des politiques et des activités qui protègent et restaurent la nature », a soutenu António Guterres.
PAM/Giulio d'Adamo
Des femmes travaillent dans un champ de l'État de Jubek, au Soudan du Sud, où le Programme alimentaire mondial promeut une agriculture durable pour renforcer les revenus et les moyens de subsistance.
Les Objectifs de développement durable et l'environnement
Le rapport examine les liens et explique comment la science et l'élaboration des politiques peuvent faire progresser les Objectifs de développement durable (ODD) d'ici 2030 et un monde neutre en carbone d'ici 2050, tout en réduisant la perte de biodiversité et la pollution.
Ses auteurs soulignent aussi qu'il est essentiel de mettre un terme au déclin environnemental pour faire progresser les ODD en matière de réduction de la pauvreté, de la sécurité alimentaire et hydrique et de la santé pour tous.
M. Guterres a mis en exergue la nécessité de faire preuve « d'urgence et d'ambition » dans la manière dont nous produisons notre nourriture et gérons notre eau, nos terres et nos océans.
Selon le chef de l’ONU, c'est avec une aide accrue pour les pays en développement « que nous pourrons protéger et restaurer la nature et nous remettre sur la voie de la réalisation des objectifs de développement durable d'ici 2030 ».
Le rapport montre que « nous avons les connaissances et les capacités nécessaires pour relever ces défis », a insisté M. Guterres.
À titre d'exemple, le rapport « Faire la paix avec la nature » souligne que l'agriculture et la pêche durables, associées à des changements de régime alimentaire et à une réduction du gaspillage alimentaire, pourraient contribuer à mettre fin à la faim et à la pauvreté dans le monde, à améliorer la nutrition et la santé, et à réserver davantage de terres et d'océans à la nature.
« Il est temps que nous apprenions à voir la nature comme une alliée qui nous aidera à atteindre les objectifs de développement durable », a dit le Secrétaire général.
Une année propice
Cette année, à compter de l'Assemblée des Nations Unies sur l'environnement qui se tiendra la semaine prochaine, un certain nombre de conférences internationales clés sur l'environnement - notamment sur le changement climatique, les produits chimiques, la biodiversité, la désertification et les océans - peuvent nous aider à nous engager sur la voie de la durabilité, a déclaré le chef de l'ONU.
« Un moment clé se produira demain, lorsque nous accueillerons à nouveau les États-Unis dans l'Accord de Paris sur le changement climatique », a-t-il souligné, notant que cette initiative « renforce l'action mondiale ».
« L'engagement du Président Biden en faveur des émissions nettes zéro signifie que les pays produisant les deux tiers de la pollution mondiale par le carbone poursuivent l'objectif de la neutralité carbone d'ici 2050 », s’est félicité M. Guterres.
Il a appelé à « faire en sorte que cette coalition soit véritablement mondiale et transformatrice », soulignant que « si elle est adoptée par tous les pays du monde, une coalition mondiale pour la neutralité carbone d'ici 2050 peut encore prévenir les pires effets du changement climatique ».
« Mais il ne peut y avoir aucun retard : nous manquons de temps pour limiter l'augmentation de la température à 1,5°C et pour renforcer la résilience aux impacts à venir », a-t-il affirmé.
Photo : Coral Reef Image Bank/Tracey Jen
Une tortue de mer glisse sur le récif des Raja Ampat, en Indonésie.
Adopter une vision
Le rapport souligne l'importance de changer les mentalités pour trouver des solutions politiques et techniques à la hauteur des crises environnementales.
« La voie vers une économie durable existe », a déclaré M. Guterres, précisant qu’elle « est guidée par les énergies renouvelables, les systèmes alimentaires durables et les solutions basées sur la nature » et qu’elle « mène à un monde inclusif, en paix avec la nature ».
« C'est la vision que nous devons tous adopter », a soutenu le chef des Nations Unies, encourageant tout le monde à utiliser le rapport pour « réévaluer et réinventer notre relation avec la nature ».
Le rapport « Faire la paix avec la nature » s'appuie sur des évaluations mondiales, notamment celles du Groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat (GIEC), de la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique pour la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES), des rapports du PNUE et des nouvelles conclusions sur l'émergence des maladies zoonotiques, comme la Covid-19.